environnement biodiversité Nature St Médard en Jalles Médoc : des tensions sur le partage de l’eau - Le blog de naturjalles.over-blog.com
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5 mars 2019 2 05 /03 /mars /2019 18:46

L’exploitation durable de leurs ressources en eau commande à l’agglomération bordelaise et à ses alentours de se tourner vers les réserves souterraines du Médoc. Ce qui ne va pas de soi.

Sur Sud Ouest https://www.sudouest.fr/2019/03/03/gironde-tensions-entre-medoc-et-bordeaux-sur-le-partage-de-l-eau-5866029-706.php

 

Les pluies éparses du week-end ont à peine mouillé les sols. Les crastes, ces fossés alignés en bordure des pistes forestières, portent la marque d’un mois de février sec comme la bruyère. « Ce sont des oueds.

Chez nous, l’eau est vite venue, vite partie », lâche Henri Sabarot, le maire de Carcans et président du Syndicat du bassin-versant des étangs du littoral girondin (Siaebvelg). « Chez nous » désigne le Médoc sylvicole, cette terre pauvre hérissée de pins en rangs serrés qui verse, à l’ouest, sur les dunes océanes. « Rien d’autre n’y pousse. J’ai fait des essais quand on a replanté après la tempête de décembre 1999 mais il n’y a pas de solution satisfaisante. Le pin, c’est tout ce qu’on a », estime André Prouvoyeur, attablé devant un café dans sa maison de Saumos.

Les sylviculteurs comme lui ont tiqué en apprenant, il y a quatre ans, que l’agglomération bordelaise s’intéressait à l’eau qui imprègne les couches de leur sous-sol. Pas la nappe phréatique de surface dans laquelle les pins adultes plongent leurs racines et pompent une centaine de litres par jour. Celle, plus profonde, avec laquelle elle communique : l’oligocène.

Chaque année, 10 millions de mètres cubes pourraient y être acheminés 40 kilomètres à l’est, pour assouvir les besoins de la métropole bordelaise et de ses environs. Certains professionnels s’en alarment. Si la nappe de l’oligocène venait à baisser du fait des forages, quelle répercussion sur l’eau de surface et sur la forêt cultivée ?

La démographie en hausse

 Le champ captant des Landes du Médoc, le nom de baptême du projet, n’alimentera pas les réseaux d’eau potable avant plusieurs années (si tant est qu’il le fasse un jour). Mais les tensions qui l’accompagnent révèlent les faiblesses du développement à la mode girondine. Selon les dernières données, le département figure en tête du classement hexagonal pour la croissance démographique. Aussi bien par le solde migratoire, les nouveaux arrivants (+ 1,1 % par an) que par le solde na

turel, les naissances (+ 0,3 % par an).

Tous ces gens ouvrent grand le robinet. En 2015, l’abonné girondin a consommé en moyenne 104 m³ d’eau. Historiquement, on a pompé dans l’éocène pour satisfaire ses besoins. Cette nappe souterraine d’excellente qualité est devenue nettement déficitaire. Il est urgent de lui trouver des ressources de substitution.

La nécessité se détache sur fond de bouleversement climatique. La soif des hommes, des animaux et des végétaux ne fera que croître à l’avenir. Il ne pleuvra pas forcément moins mais différemment. Avec, probablement, des déficits en été, ce qui entraînera des sécheresses sévères.

Entre la ville et la campagne

 Dans ce contexte, la campagne (médocaine) regarde la ville (bordelaise) avec méfiance, voire plus. L’actualité de ces derniers mois, estampillée gilets jaunes, ne fait rien pour dissiper le malaise. Dans le triangle concerné (Saumos, Sainte-Hélène, Le Temple), on se demande pourquoi Bordeaux devrait venir boire dans le Médoc, sans même dire merci.

Maire d’Ambès et délégué à la préservation des ressources en eau à Bordeaux Métropole, Jean-Pierre Turon réfute l’argument. « On comprend bien que certains veulent l’utiliser, c’est facile. Mais nous vivons dans un monde où les gens bougent. Des Médocains viennent étudier à Bordeaux, d’autres y travaillent. La population consomme là où elle se trouve », répond-il.

La Métropole, qui abrite la moitié de la population girondine, a beau jeu d’opposer ses chiffres. Sur les 10 millions de mètres cubes annuels qui seraient prélevés sur le champ captant, elle n’en utiliserait pas plus de 5,5 millions. Le reste serait envoyé dans les canalisations de la première et de la deuxième couronnes bordelaises, en territoire majoritairement périurbain, voire rural. Parallèlement, Bordeaux Métropole ne cesse d’émettre des signaux rassurants en direction des sylviculteurs. Selon le dossier coordonné par le Smegreg (le syndicat mixte chargé de la ressource en eau de la Gironde), la nappe de surface encaisserait dans le pire des cas des baisses de l’ordre de 10 centimètres. Et continuerait à remplir son office auprès des pins.

Afin de prouver sa bonne foi, Bordeaux Métropole a voté, en décembre, le principe d’un protocole d’accord avec le Syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest. Il permettrait d’indemniser les professionnels victimes de baisse de la productivité forestière en lien avec le champ captant. Tout le monde n’est pas convaincu.

Des incertitudes sur l’avenir

 Président de Vive la forêt, une association affiliée à France nature environnement, Patrick Point engage le fer sur d’autres aspects du dossier. Les chiffres actuels de l’alimentation en eau potable et les projections qu’on peut en tirer pour l’avenir l’inquiètent. Selon lui, un prélèvement annuel de 10 millions de m³, ça ne passe pas. « On ne refuse pas de partager mais il ne faut pas dépasser 5 à 7 millions de m³ par an », dit-il, penché sur une épaisse documentation.

En tirant 10 millions de m³, l’agglomération bordelaise et ses alentours priveraient la zone littorale des ressources nécessaires à sa propre croissance démographique à un horizon de dix ans. Il n’y aurait plus assez de marge. De la marge, c’est justement ce qui manque à Bordeaux Métropole, contrainte d’anticiper. Face à cette réalité, Henri Sabarot s’interroge. « Pourquoi continuer à se servir d’une eau d’une telle qualité pour tirer les chasses d’eau et arroser les ronds-points ? » Même si nombre d’usages dispendieux ont disparu ces dernières années, la question appuie là où ça fait mal

 

POURQUOI PAS L’OCÉAN ?

Certains opposants au projet de champ captant des Landes du Médoc objectent que l’océan, tout proche, promet des ressources en eau inépuisables pour peu qu’on fasse l’effort de la dessaler. Pivot technique du dossier, le Smegreg répond que cette option « pose le problème de la consommation d’énergie. Si les progrès ont permis de diviser par cinq en trente ans la quantité d’énergie nécessaire pour dessaler l’eau de mer, on reste toujours sur des coûts élevés, de l’ordre de 1,5 €/m3, soit plus de six fois supérieurs au coût de production pour un projet classique. » Pour Jean-Pierre Turon, un tel choix n’est fait qu’en dernière extrémité, dans des régions généralement arides. « Je ne dis pas que ça n’arrivera jamais ici mais ce n’est pas une solution pour les temps actuels », rétorque-t-il.

Médoc : des tensions sur le partage de l’eau

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